Tout évolue, même la langue et l’orthographe

IL peut être frustrant d’apprendre que tous les efforts faits pour apprendre certaines règles orthographiques et leurs nombreuses exceptions ne servent plus à grand-chose si ce n’est à consacrer à une certaine esthétique. Cependant, un peu d’histoire de la langue française montre que lesdites règles ont souvent été choisies de façon bien arbitraire par une Académie tentant peut-être de justifier sa raison d’être. Mais si vous acceptez si bien l’arbitraire, vous ne devriez pas être gêné·e par les nouveautés que propose la réforme orthographique de 1990 ou l’écriture inclusive, à moins qu’en fait, vous ne considériez que le français soit une langue morte.

Ce n’est qu’à partir du 2025.05.01 que les pages de ce site se convertissent peu à peu à l’orthographe réformée de 1990 ― l’orthographe inclusive y étant utilisée depuis plus longtemps.

La féminisation de certains termes

Il s’est agi d’un premier pas et il faut vraiment être dogmatique pour refuser magistrate, députée... d’autant que «Madame l’Ambassadrice» existe depuis longtemps, même s’il ne s’agit «que» de la femme de l’Ambassadeur en fonction, ce qui laisse supposer que ce n’est pas tant la forme qui choque, mais le fond.

Il ne s’agirait de plus que d’une reféminisation ou d’une démasculinisation, bien des mots féminins ayant été supprimés par l’Académie.

L’accord de l’adjectif

Pour en finir sur la règle du XVIIe par l’Académie française, qui veut que «le masculin l’emporte sur le féminin», on peut revenir sur la pratique de l’accord de voisinage, admis encore récemment en français, accordant l’adjectif avec le substantif le plus proche :

Les mots et les significations apprises ― Les significations et les mots appris

Wikipedia, dans son article Règle de proximité, nous apprends que c’est la règle en grec ancien et en latin, ainsi que dans les langues romanes. C’est par exemple la norme en castillan et en portugais, langues dont le genre est plus audible qu’en français, où les adjectifs sont plus souvent épicènes.

L’écriture inclusive

Le livre Raphaël Haddad, Éliane Viennot, Alicia Birr et aliiL’écriture inclusive, et si l’on s’y mettait ? relève plusieurs façon de contourner le masculin dit «englobant», qui n’est pas si neutre :

À moins d’être résolument réactionnaire, les plus conservateurs admettront l’une ou l’autre de ces pratiques, tandis que les personnes favorables aux changements peuvent en refuser d’autres.

Une formulation plus englobante

C’est peut-être la solution la plus simple : «habitants» peut être remplacé par «population» ou «personnes» selon que l’on veuille considérer l’ensemble ou les individus ; «population étudiante» est précis et englobant.

Les mots épicènes

Certains mots ont exactement la même forme au masculin et au féminin, comme «ministre». Pas besoin de «ministresse», «la ministre» suffisant. Mais il n’y a pas de synonyme épicène exact pour tous les mots, et la proposition d’«élève» pour «étudiant» ne convainc pas nécessairement.

Le redoublement au féminin

Il peut être important d’utiliser explicitement le même terme décliné aux deux sexes, comme «Les enseignants et les enseignantes». C’est peut-être un peu lourd, mais fédérateur.

Le point médian

Ce redoublement peut être abrégé avec le point médian : «les enseignant·es», qui remplace avantageusement les parenthèses, qui semblent plus une concession, comme dans «enseignant(e)s»

Les mots composites

Pour les pronoms personnels, il est possible d’utiliser des mots composites tels que «iel», «cellui», «celleux», «ellui», «elleux». Cela semble artificiel, comme tout mot-valise ― mais qui n’en utilise jamais ?

Ne vous rabaissez pas à blâmer les dictionnaires qui relèvent ces formes nouvelles : on attend des lexicographes qu’iels constatent et définissent les termes. La norme est le rôle d’une Académie, dont de nombreux de pays parviennent par ailleurs à se passer. En Allemagne par exemple, Le «conseil pour l’orthographe allemande» (Der Rat für deutsche Rechtschreibung, interétatique) est composé de spécialistes et fonctionnaires, il ne s’agit donc pas de personnes cooptées depuis près de quatre siècles parmi lesquelles figurent très peu de philologues, mais qui prétendent décider pour la francophonie entière, comme si le français appartenait à la France.

Le site divergenre.org reprend les propositions pour ces mots-valises.

Il existe en France depuis le 5 mai 2021 la circulaire du ministre Jean-Michel Blanquer qui interdit l'enseignement du point médian à l'école, en ne se référant pas à une quelconque étude issue d'une recherche ou enquête mais à l'avis de la Secrétaire perpétuelle de l'Académie française, Hélène Carrère d'Encausse. La féminisation des noms de fonction (1998) y est rappelée, mais la primauté du masculin dans l'accord des adjectifs est maintenue. Le Conseil d'État a validé la circulaire le 20 mai 2024.